L'"aryanisation", c'est-à-dire la
dépossession des biens des juifs s'est d'abord exercée d'une
façon sauvage avant d'être ensuite relayée et organisée par
l'Etat nazi. Si cette spoliation ne fut, ces dernières années,
évoquée que dans le cadre des vols spectaculaires d'oeuvres
d'art, les razzias effectuées par la police secrète d'état ne
concernaient pourtant pas seulement les oeuvres d'art, l'argent
et autres objets de valeur.
A Vienne comme ailleurs,
la Gestapo raflait également dans les maisons des juifs les
objets les plus ordinaires et les plus quotidiens. Les couverts
rangés dans les tiroirs, le linge serré dans les armoires
jusqu'aux souvenirs photographiques ne furent pas épargnés.
C'est ainsi que le mobilier de huit familles
juives viennoises "expropriées" fut entreposé en mars 1938 après
l'Anschluss dans un garde-meuble de l'Etat autrichien à Vienne
("Kaiserliches Hofmobiliendepot"). Une grande part de ce
mobilier fit l'objet d'un inventaire et devint alors propriété
de l'Etat autrichien. Bien peu de ces objets après guerre fut
restitué à leurs anciens propriétaires.
Pendant l'époque nazi et jusqu'en 1998, le
mobilier provenant de ce fonds - conformément à la fonction même
de ce dépôt - fut prêté avant tout aux services de
l'administration. Jusqu'à l'époque la plus récente et sans même
que les utilisateurs de ces objets n'en aient su la provenance,
ce mobilier se retrouvait dans de simples bureaux ministériels,
dans les ambassades autrichiennes à l'étranger, voire dans les
théâtres. Depuis 1994, l'administration de ce dépôt mobilier a
entrepris une recherche approfondie. Au terme de cette
recherche, une partie de ces objets encore existants a pu dès
1998, en vertu de la loi de restitution, être rendue aux
familles des anciens propriétaires.
Ces données historiques constituent le point
de départ de l'exposition. Elle a pour objet de thématiser
l'"aryanisation" des biens de ces huit familles juives et de
rendre compte de la façon dont les institutions d'Etat ont,
jusqu'à l'époque la plus récente, considéré ces objets.
Le cas de ces huit familles ne reflète qu'une partie infime de
la dépossession totale des biens des juifs. Mais ces
illustrations rendent intelligibles d'une façon exemplaire les
mécanismes de ce processus brutal. Par exemple : la
transformation d'une razzia et d'une expropriation en un simple
acte administratif. La "légalisation" et la "normalisation"
ayant été rendues possibles par le fait même que les
institutions ont été partie prenante de cet acte de barbarie.
C'est dans le cadre de cette exposition qu'une
installation du photographe Arno Gisinger est présentée. Un
catalogue accompagnera cette exposition. Celle-ci servira de
contribution à un débat sur ce thème de l'"aryanisation" en
Autriche. On ne peut laisser à la seule politique le soin d'un
tel débat qui doit être mené dans toutes les couches de la
société. Débat à conduire avec – et au sein - des institutions
qui ont participé à l'époque à ces actes barbares.
Lieu d'exposition
Kaiserliches Hofmobiliendepot Mariahilfer Straße 88/Eingang
Andreasgasse 7 A-1070 Wien
Organisation MMD (Museen des
Mobiliendepots) AG theoretische und angewandte Museologie
Institut für Interdisziplinäre Forschung und Fortbildung der
Universitäten Klagenfurt, Wien, Innsbruck, Graz (IFF)
Concept et réalisation scientifique
Ilsebill Barta-Fliedl Herbert Posch
Installation photographique Arno
Gisinger
Communication Eva Grabherr
Fon/fax ++43-1-4700819, ++43-664-1536536 e-mail
eva.grabherr@univie.ac.at
hagalil.com
12-09-2000
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